mercredi 15 mars 2023

35 - Pourquoi faut-il abandonner les projets de construction d'éoliennes en France

Blog du collectif Vigies de la côte des Aven.

Articles déjà parus : https://vigiesdesavens.blogspot.com/2021/11/index-des-articles-deja-parus.html

Je vous propose dans cet article  une petite synthèse des raisons qui devraient conduire le gouvernement à l'abandon des projets d'éoliennes géantes devant nos côtes.

En effet, les éoliennes n'ont aucun intérêt dans un pays comme la France, et plus généralement la "diversité" du mix électrique incluant également le solaire, voici pourquoi :

 



Intermittence de la production

Leur intermittence doit être compensée par d'autres sources d'énergie (fossiles, gaz de préférence, ou nucléaire) si on veut que les trains partent à l'heure (!)

- En Allemagne, où l'électricité est principalement d'origine fossile (gaz, charbon, lignite, dans l'ordre de nuisances croissantes) du fait de la fermeture des centrales nucléaires, quand les éoliennes tournent, cela fait  effectivement moins de CO2 rejeté dans l'atmosphère.

- En France, où la majeure partie de l'électricité est nucléaire, on est parfois contraint de baisser la puissance des centrales, ce qui ne produit aucune économie réelle, et EDF est obligé par contrat d'acheter leur production à un prix élevé, même si ce n'est pas utile.

- On a mis en service l'an dernier à Landivisiau une centrale à gaz de 446 MW (soit 1/4 de Fessenheim) et maintenu la centrale à charbon de Cordemais pour alimenter le grand ouest dont la situation énergétique est tendue du fait de la décision politique de ne pas construire de centrale nucléaire à Plogoff...

Stockage de l'électricité illusoire

 Le stockage de l'électricité est un fantasme que l'on met en avant, sans tenir compte des ordres de grandeur. Les électrons produits doivent être utilisés aussitôt. Ainsi, les batteries associées généralement aux panneaux solaires ne permettent généralement de stocker qu'une heure de consommation, ce qui est exigé par RTE afin de pouvoir stabiliser le réseau. En aucun cas, cela ne permettra de couvrir les heures nocturnes sans production d'énergie.

- Le seul stockage d'électricité  actuellement efficace et d'une capacité significative est le turbinage d'eau dans les barrages avec un rendement acceptable de 80%. On ne construira plus de nouveau barrage en France, mais on peut encore équiper de STEP quelques barrages existants.

- La production hydrogène doit être considéré comme un stockage d'électricité sous une forme transportable, mais sous une forme beaucoup moins concentrée que les carburants liquides. Le rendement du cycle complet, le stockage à haute pression (400 bars), voire à l'état  liquide (cryogénique, comme dans les fusées), et son utilisation dans une pile à combustible n'est que de 25%. Ce qui signifie qu'il faut 4 fois plus d'éoliennes pour récupérer la même quantité d'énergie.

Aucun constructeur n'est français

Les constructeurs d'éoliennes  sont tous étrangers (Espagnol, Allemands, Danois pour les Européens) et en France on ne fait actuellement que de l'assemblage d'éléments construits ailleurs. Les constructeurs qui ont saturé le marché dans leurs pays d'origine cherchent de nouveaux débouchés commerciaux en profitant de la confusion actuelle sur le marché de l'énergie.

Le principe de tarification de l'électricité imposé au niveau européen permet à quelques opérateurs de rafler un maximum d'argent public, et de ruiner EDF, argent qui serait bien mieux utilisé à financer les nouvelles centrales nucléaires.

On peut même dire que l'Allemagne mène une guerre de l'énergie à la France en cherchant à imposer leur vision idéologique, et leur parti prix antinucléaire catastrophique pour l'environnement.

Quelques avantages tout de même (toutefois discutables)

Le premier intérêt qu'on peut trouver à cette "diversification" des sources d'électricité est d'aller plus vite que la construction de centrales nucléaires proposée par le président de la République. 

        Il y aurait  un moyen peu cher pour mettre en service 2 nouvelles centrales nucléaires sous 3 à 5 ans : utiliser les 2 chaudières nucléaires de Fessenheim encore en place, leur installer de nouvelles turbines (made in France) et de refaire tous les systèmes de contrôle. Loïc Lefloc'h-Prigent dans une interview la semaine dernière sur Europe 1 évaluait ce coût à 2 milliards d'€, l'an dernier, une telle décision n'aurait coûté qu'un seul milliard. Pour ce  montant, on aurait une puissance électrique équivalente à  225 éoliennes géantes de 8 MW  telles que celle qu'on veut nous installer à Belle-Île-en-Mer. Sans parler du fait que si on tient compte du facteur de charge (80% vs 40%) c'est en fait le double, soit 450 éoliennes.

- Juste un mot au passage sur les turbines des centrales (pas seulement nucléaires) construites à Belfort par General Electric, dont l'usine été vendue aux Américains sur une décision de Macron, et qu'EDF a du racheter, car ils menaçaient de la fermer. Le même Macron qui a annoncé à Belfort la construction de nouvelles centrales nucléaires. (voir https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/nucleaire-edf-tombe-enfin-daccord-avec-general-electric-pour-reprendre-les-turbines-arabelle-1876079) Sans commentaires.

L'autre intérêt pour le gouvernement est que le coût d'investissement des éoliennes est supporté par l'opérateur qui fait ainsi une affaire purement commerciale, alors que pour le nucléaire ou les barrages, ce coût doit être supporté par EDF, c'est à dire l'état Français, actionnaire majoritaire. Le coût du raccordement au réseau est garanti par contrat et son coût est supporté par RTE.

Extraction minière des métaux

Les éoliennes, et plus généralement l'électrification des usages vont remplacer une dépendance aux énergies fossiles (qui sont néanmoins nécessaires pour les construire) par une dépendance aux métaux qu'on n'a pas non plus sur le sol français, et dont les réserves mondiales seront insuffisantes, car de plus en plus difficiles à extraire (avec des engins utilisant du fuel), car les taux des minerais sont en baisse. 

- Prenons l'exemple du cuivre, indispensable pour tout de qui est électrique : le taux en cuivre du minerai extrait  du Chili (principal fournisseur mondial de cuivre)  a diminué d'un facteur 10 des dernières décennies, ce qui signifie qu'il faut extraire 10 fois plus de roches pour obtenir la même quantité de cuivre, et que les réserves s'épuisent. Par ailleurs à noter que l'extraction minière est très énergivore, et qu'on n’extrait rien du sol avec des éoliennes et des panneaux solaires.

Voir cette vidéo d'Aurore Stéphan sur ce sujet.


Coût complet très largement sous-estimé

Le fait d'annoncer que le coût du MW éolien (et plus généralement du renouvelable) serait inférieur au MW nucléaire est une intox qui ne tient pas compte des réalités suivantes :

- une éolienne ne dure que 20 à 25 ans (et encore je suis curieux de voir ce que vont durer les éoliennes marines)  alors qu'une centrale nucléaire dure jusqu'à 60 ans

- il faut tenir compte dans le coût du renouvelable, du coût du système électrique complet, avec les installations qui permettent de couvrir les besoins des jours sans vent et la nuit (pour le solaire), soit le stockage de l'électricité (?), soit une production par des centrales à gaz ou au charbon comme en Allemagne (lignite !)

- les éoliennes et panneaux solaires sont actuellement construits (notamment en en Chine) avec des énergies fossiles. Ce serait une autre histoire si on devait utiliser exclusivement des énergies renouvelables pour les construire.

- le scénario tout renouvelable sans nucléaire de RTE est totalement irréaliste techniquement, c'est du pipeau à l'attention des esprits crédules qui ont envie d'y croire, et qui n'ont pas lu les prérequis techniques qui sont pourtant listés dans le rapport, et dont la plupart relèvent de la science-fiction.

Politique de l'énergie en France totalement incohérente

Je retiens l'expression de Yves Brechet qui parle de "canard sans tête" quant aux décisions prises relatives à la production d'énergie ces dernières décennies en France.

Il n'y a pas de miracle, le moteur d'un système économique est alimenté par l'énergie qu'il consomme. Sans énergie, pas de PIB, pas d'emploi, pas de pouvoir d'achat, pas d'argent pour les retraites, pas d'hôpitaux, de médicament, etc.

Ou alors, énormément d'emplois dans l'agriculture, comme il y a 2 siècles avant la révolution industrielle qui n'a été rendue possible que par les énergies fossiles.

La politique énergétique d'un pays devrait être prise comme une condition essentielle du fonctionnement  de notre société, donc à considérer comme un point majeur et préalable à toute politique. 

Ce n'est malheureusement pas ce qu'on apprend à l'ENA.

Le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur la souveraineté énergétique de la France n’est pas encore sorti, mais on peut en consulter les comptes-rendus de réunion, ce qui a été fait par Emmanuelle Ducros sur Europe 1 ce matin dans sa rubrique « Voyage en absurdie » que je vous conseille tout particulièrement.

Malheureusement, cela ne nous apprend rien….

Pour finir, je vous propose  de visionner une interview de Jean-Marc Jancovici qui parle comme toujours avec beaucoup de pédagogie de l'épuisement prévisible des ressources de la planète.

https://youtu.be/H5NAhJoQjQ8


dimanche 12 mars 2023

29 - Annonces d'Emmanuel Macron sur l'énergie en 2050

Blog du collectif Vigies de la côte des Aven.

Articles déjà parus ; https://vigiesdesavens.blogspot.com/2021/11/index-des-articles-deja-parus.html     

Les annonces d'Emmanuel Macron à Belfort sur la relance du nucléaire, correspondent pratiquement au scénario N03 élaboré par RTE dans son rapport et objet de mon article n° 12  du 9 novembre 2021. Je vous propose ici une analyse critique des ces annonces dans un nouveau scénario que j'appellerai ici EM03, en abordant les aspects techniques, mais aussi les aspects coûts.

    Ces annonces reposent sur 2 volets, le premier étant la construction de nouvelles centrales, le second, étant le maintien en service le plus longtemps possible des réacteurs nucléaires actuels, ceci en écart important à la Stratégie Nationale Bas Carbone et à la Loi de Transition Energétique pour la Croissance Verte (LTECV), déclinés en 2020 par la Programmation Pluriannuelle de l'Energie qui prévoit la fermeture de 6 anciens réacteurs nucléaires d'ici 2028, de 8 autres d'ici 2035 avec un objectif de neutralité carbone en 2050 sans nouveau nucléaire.

     « Je souhaite qu'aucun réacteur nucléaire en état de produire ne soit fermé à l'avenir, compte tenu de la hausse très importante de nos besoins électriques, sauf évidemment raison de sûreté »

    La construction de 6 EPR d'ici 2035 et de 8 EPR d'ici 2050 est donc l'objectif annoncé, et la difficulté, c'est que la capacité industrielle française serait incapable de faire plus, selon les différents experts consultés par RTE. C'est pour cela qu'en même temps, Macron propose d'augmenter considérablement les ENR, solaire, éolien, et notamment éolien maritime.


Scénario EM03 : objectif de 50 GW de nucléaire en 2050


Nucléaire en 2050 : 50 GW pour 325 TWh de production électrique  annuelle et un coût total de 250 Md€

L'annonce d'Emmanuel Macron est en fait de maintenir en fonctionnement tous les anciens réacteurs qui le pourront en toute sécurité, avec un avis favorable de l'ASN après les mises à niveau qui s'imposeront. En fait sur les anciens réacteurs comme Fessenheim, tout les composants qui le peuvent ont été remplacés, ou le seront, à l'exception de la cuve. Si tout va bien, on pourra peut-être en fermer moins qu'annoncé dans ce scénario. 

Il n'en reste pas moins que si on se projette en 2050, ces réacteurs finiront par être arrêtés. L'annonce du président ne joue que un retard dans les arrêts de centrales qui permettront peut-être de rattraper les 10 ans perdus à ne pas construire de nouveau nucléaire pour prendre le relais.

Dans les scénarios N03 et EM03, on conserve 24 GW de puissance nucléaire existant en fermant les 24 réacteurs de 900 MW et les 12 réacteurs de 1300 MW les plus anciens. 

Pour atteindre un objectif total proche de 50 MW de puissance nucléaire, on doit donc construire en plus du réacteur de Flamanville, 7 paires de réacteurs de type EPR pour une puissance totale de 25 GW, et autant de paires de SMR répartis sur le territoire en appui des énergies renouvelables, soit un total de 2,4 GW. La production nucléaire de ces nouvelles centrales sera de 178 TWh annuels, soit un facteur de charge de l'ordre de 75%.


La production nucléaire qui représente 25% de la puissance déployée dans ce scénario serait ainsi de 325 TWh annuels, soit 50% de l'objectif de production totale d'électricité de 640 TWh en 2050.

Le coût de cet investissement est annoncé à 50 Md€ pour 6 nouveaux EPR, soit 8 800 M€ l'unité. Pour un total de 14 EPR, cela coûtera près de 150 Md€. Il faut ajouter à cela environ 100 Md€ pour la maintenance des anciens réacteurs, estimation faite par EDF jusqu'en 2050.

Au total, ce scénario suppose un investissement d'environ 250 Md€ sur 28 ans, soit environ 9 Md€ par an, pour des centrales conçues pour durer 60 ans et qui auront encore entre 35 et 50 ans de vie en 2050. On notera ici que le coût du nouveau MW nucléaire installé est en moyenne de 5 M€, chiffre à comparer avec d'autres sources d'électricité.

ENR fatales en 2050 : 172 TW déployés pour 344 TWh d'électricité produite annuellement et un coût total de 312 Md€

Le nouveau nucléaire est complétée dans l'annonce du président par une débauche de déploiements de moyens de production d'électricité dites renouvelables, dont l'intermittence n'est compensée que par certain nombre de "Moyens de flexibilité", tels qu'il sont dénommés dans le scénario RTE, et qui relèvent soit de la science fiction, soit sont carrément inquiétants comme l'importation d'électricité (allemande ?), ou bien la capacité d'effacement, et d'autres terme les coupures d'électricité sur certains gros industriels, ce qui ne sera pas sans incidences économiques et sociales.


Photovoltaïque EM03 : 100 GW - 105 Md€

    Pour obtenir les 100 GW annoncés (au lieu de 70 prévus dans le scénario N03), il faudra déployer au total plus de 86 000 hectares de panneaux solaires, soit 9 fois la surface totale déjà déployée en 2020.  Une production électrique annuelle de 140 TWh serait obtenue avec un facteur de charge de 14% qui correspond à ce qu'on observe à ce jour.

Sachant que le coût moyen de de déploiement d'une ferme solaire de 500 MW est de l'ordre de 500 M€ on peur compter environs 1 Me par MW solaire (beaucoup plus pour du solaire résidentiel en toiture). L'objectif de 100 TW solaire annoncé par Emmanuel Macron coûtera au minimum 100 Md€ pour une durée de vie de 25 ans, donc à renouveler en 2050, auxquels il faut ajouter environ 4,5 Md€ pour le renouvellement de 50% des panneaux déjà installés d'ici 2050 (en fait probablement beaucoup plus).


Éolien terrestre EM03 : 32 GW - 48 Md€
    L'annonce d'Emmanuel Macron sur l'éolien terrestre est de seulement doubler le parc existant (contre 2,5 dans le scénario RTE). La puissance installée passerait donc à 32 GW (contre 43 GW dans N03) pour environ 16 000 mâts, soit une production de 64,5 TWh annuels (contre 86 TWh) pour un facteur de charge de 23%.


Le coût moyen du MW éolien terrestre étant également de l'ordre du M€, l'investissement global de 8000 mâts supplémentaires sera de 32 Md€ pour un matériel ne durant que 25 ans, et environ 16 Md€ pour le renouvellement de la moitié des mâts actuellement installés qui vont arriver en fin de vie.

Éolien en mer EM03 : 40 GW
    Etant donné la réduction (modérée) des ambitions sur l'éolien terrestre justifiée par l'opposition systématique rencontrée à ces projets, Emmanuel Macron fait le forcing sur l'éolien maritime qui n'aurait pas cet inconvénient (sic).

Il prévoit donc dans cette annonce la construction de 50 parcs éoliens maritimes pour un total de 40 GW (pour 22 GW dans le scénario RTE) d'éolien maritime, soit une puissance de 800 MW par parc éolien. Si les éoliennes maritimes ont un puissance unitaire de 8 MW, cela fait 100 éoliennes géantes par parc, soit un total de 5000 éoliennes.

Or, sur les 11 projets de parc marins de la PPE actuellement en préparation ou en construction, on est plutôt à 60 éoliennes par parc, soit 480 MW.

On peut alors espérer 140 TWh de production d'électricité (soit le double du scénario RTE) avec un facteur de charge très optimiste de 40% (au lieu de 35% actuellement constatés sur ce type d’éolienne).

Selon différentes sources, le coût du MW éolien maritime installé et raccordé au réseau est de l'ordre de 4 M€ (à comparer à 5 M€ pour le nucléaire). Le coût global des investissements annoncés par Emmanuel Macron se montera à 160 Md€ pour des installations qui ne durerons que 25 ans, donc à renouveler peu après 2050...



    Sur ces hypothèses EM03, la puissance totale du renouvelable fatal, disponible les jours de soleil et de vent suffisant soit au mieux 25% du temps, sera de 172 TW pour une production électrique de 345 TWh, le total des investissements se montant à un total de 312 Md€ sur 28 ans, soit plus de 11 Md€ par an si on étale les investissements.

Autres moyens de production pilotables


Hydraulique existant : 22 MW pour 63 GWh produits
    Il n'y aura pas de nouveau barrage construit en France, qui ne dispose plus d'aucun site exploitable. Les 2300 barrages actuels continueront de délivrer une puissance de 22 MW et de produire 63 GWh d'électricité renouvelable avec un facteur de charge moyen de 33%.

Thermique existant : 446 MW pour 3 GWh produits

    Dans ce scénario, la totalité des centrales thermiques fossiles françaises seraient arrêtées, à l'exception de la centrale de Landivisiau qui va être mises en service de mois-ci (Fév. 2022) et conçue pour durer 30 ans.

 Moyens de flexibilité

    Dans ce scénario EM03, la somme des puissances des moyens de production d'électricité soumis aux aléas météorologiques est de 172 GW, à comparer au total des moyens pilotables (hydraulique, bioénergies et nucléaire) qui est de 76,4 GW. Il manque donc encore 96 GW de pilotable si on souhaite une sécurité d'approvisionnement de 100% en toutes circonstances, (la nuit et quand il n'y a pas de vent) et qui sont répartis les moyens de flexibilité suivants :
 

Capacité d'importation : 5,2%

Le scénario N03 comme M0 prévoit la possibilité d’importer jusqu'à 39 GW de puissance électrique, qui risque de coûter cher et être très carbonée selon le pays voisin producteur. Cela dit, ce chiffre n'a pas vraiment de sens, car il faudrait compter non pas en GW, mais en TWh : par exemple la France a exporté 40 TWh d'électricité en 2020.


Flexibilité de la demande : 1,7%

La valeur proposée dans ce scénario est de 13 GW de capacité d'effacement, soit l'équivalent d'environ 10 réacteurs nucléaires, ce qui ne sera pas sans conséquence sur le fonctionnement des entreprises concernées, et sur l'économie du pays.

Vehicle-to-grid : 0,2%

Dans ce scénario, le V2G (Vehicle-to-grid)  à été revu à la baisse avec 1,7 GW, soit environ 17 000 voitures connectées pour une capacité d'une heure.

STEP : 1%

L’objectif dans ce scénario comme dans les autres est de monter la capacité des Stations de Transfert d'énergie par Pompage à 8 GW, soit par 4 ou 5 stations supplémentaires à construire on ne sait où.


Nouveau thermique décarboné : 0%

Cette option a disparu dans ce scénario, car le nucléaire est bien plus efficace pour produire de l'électricité décarbonée, et la technologie a le mérite d'exister, malgré les difficultés rencontrées actuellement sur l'EPR. 

En effet le « nouveau thermique décarboné » qui est pris dans les hypothèses RTE N03 relève de la science-fiction. On porrait effectivement brûler de l’hydrogène, mais il faut encore savoir avec quelle électricité on le produit (nucléaire dédié ?) En effet, les électrolyseurs tels qu’on les connait s’accommodent mal d’une électricité intermittente), on peut aussi imaginer brûler du charbon en récupérant  tout ce qui sort des cheminées….

Batteries  : 0,13%

Dans ce scénario, on donne un chiffre de 1 GW, ce qui une fois encore ne renseigne pas sur la capacité d'électricité stockée. On est encore réduit à des conjectures sur la durée du stockage : combien d'heures, de jours sont-ils nécessaires ?

Si on considère un stockage sur batteries permettant de délivrer une puissance de 1 GW sur 24 heures, cela donne une capacité totale de 24 GWh de batteries, soit l'équivalent d'environ 24 000 voitures TESLA Model S dont la batterie à une capacité de 100 kWh. On arrive à une capacité qui parait plus raisonnable à réaliser avec des batteries et répartie sur différents sites.

Conclusion

Dans ce dernier scénario la puissance totale des énergies pilotables (nucléaire, hydraulique et bioénergies) est de 76,4 GW, à comparer aux 135 GW d’énergies renouvelables fatales. Les "moyens de flexibilité" sont chiffrés à hauteur de 62,7 GW. pour combler cet écart.

Si on fait le rapport entre la puissance pilotable à laquelle on ajoute la puissance des moyens de flexibilité, soit 139 GW et la puissance des moyens fatals de 135 GW, on obtient un taux de sécurité théorique de 100%.

Toutefois, cela repose sur une hypothèse de 39 GW d'importations et de 13 GW de capacité d'effacement, soit près de 6% de la puissance totale, ce qui nous éloigne des 100% de sécurité d'approvisionnement. Encore une fois, le fait que ces chiffres soient exprimés en GW et non pas en GWh, ne nous permettent pas de bien évaluer ce scénario. Il manque ce qu'on pourrait appeler le "facteur de charge" de ces moyens, c'est-à-dire le pourcentage prévisionnel de leur utilisation sur l'année.  

La principale critique que je ferai de ce scénario, c'est le chiffre de 633 TWh de production totale d'électricité qui me parait faible à une époque où l'on est censé avoir électrifié de nombreuses utilisations d'énergies fossiles. Le document RTE fixe une trajectoire énergétique qui pourrait atteindre les 750 TWh annuels, que l'on est loin d'atteindre ici. Encore une fois, les économies et la réduction des dépenses énergétiques doivent porter sur le thermique, et non pas sur l'électricité qui est justement le moyen de décarboner nos émissions.

Ce scénario démontre également que si on considère l'ensemble des coûts de chaque filière, et non pas simplement chaque technologie isolément, un système énergétique fondé pour l’essentiel sur le nucléaire fait baisser les coûts globaux, ce qui est contre-intuitif.

RTE montre également dans son rapport les limites industrielles de la filière nucléaire, indépendamment de tout aspect politique, et affirme qu'on ne sera pas capable de construire plus de 14 EPR sur la période considérée, ce qui justifie qu'on soit contraint de faire appel aux énergies renouvelables en quantités encore très importantes par rapport à l'existant et notamment à un nombre très important de parcs éoliens maritimes…

Voir l'article du Point :

"Nucléaire, éolien et solaire : quel sera le visage de la France en 2050 ?"

qui fait une bonne analyse de l'ensemble du rapport.


Jean-Paul Arnoul

Pour le Collectif Vigies de la côte des Avens

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